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"SANS LA LIBERTE DE BLÂMER, IL N'EST POINT D'ELOGE FLATTEUR" (Beaumarchais)
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30 décembre 2004

LES IMMIGRES ET LES JEUX DE HASARD

  LES IMMIGRES ET LES JEUX DE HASARD

Les Sénégalais de Paris les appellent « Fass », les chevaux de course.

Prix de l’Arc de triomphe », « Prix du Jardin du Luxembourg », « Prix de Jouy-en-Josas », la communauté immigrée africaine connaît toutes les ficelles des jeux de hasard en France. Chaque soir, dés que le signale de départ est donné sur « La Une », c’est un silence radio dans tous les salons. Pendant ce moment, les destins sont suspendus aux résultats d’un quinté, d’un quarté ou d’un tiercé.  En fonction des mises, chaque parieur espère voir son sort basculé à la faveur de 3, 4 ou 5 numéros.

Cette obsession des jeux de hasard est caractéristique de la part forte du ludique dans la vie d’un immigré, aventurier par excellence. Pour cet homme qui a fui une condition écrasée chez lui par des cieux très peu cléments, tout devient un jeu, un pur hasard. A l’origine, l’immigré est ce promeneur solitaire qui sait d’où il vient, mais qui ignore où il va. Ce qui importe chez lui, c’est l’aller, le retour restant un inconnu  dont il confie la gestion aux dieux, à Allah. Le jeu de hasard pour lui participe de son acharnement à vaincre la donnée connue chez lui qui est celle d’homme pauvre et misérable mais aussi c’est une façon pour lui d’engager une dynamique créatrice et anticipatrice sur le possible. Les courses hippiques fonctionnent dans sa vie comme le seul moyen de combattre le présent et d’engager un dialogue de délivrance avec le possible. En pariant, l’immigré pense  ainsi que toute la totalité des virtualités de son existence pourrait d’un seul coup être présenté par les résultats du pronostic. Les virtualités de cette existence peuvent : être millionnaire, avoir une très belle villa au pays, acheter un bel appartement en France…bref, cette virtualité qui pousse à parier, c’est tout ce qui est impossible chez lui dans le présent. Les objectifs de ces immigrés parieurs sont extrêmement pratiques et concrets Lorsqu’ils se présentent au tabac, les pronostiqueurs sont dans leur imaginaire tout ce qu’ils ne sont pas au moment présent c’est à dire richards. Ils se  projettent hors de ce qu’ils sont. Dans la plupart des cas, face au désenchantement qui accompagne le rêve brisé d’une vie meilleure en France idéalisée avant le départ du pays, le PMU redevient un refuge, un abri où asseoir momentanément tous les espoirs, une sorte de laïcisation de l’espoir. Loin d’être un espace où se met en œuvre la passion du ludique, les tabacs épousent l’aspect d’exutoire où se rencontrent  tous les possibles. Avant le coup d’envoi des courses, tous ceux qui ont parié dans la journée sont animés par le sentiment  d’être virtuellement des riches, des millionnaires et vivent dans ce fait, l’anticipent jusqu’au soir où beaucoup découvriront qu’ils ont perdu « bêtement » 10, 20, 50 voir même 100 euros. Cette projection dans un monde de millionnaire permet à beaucoup de gens de supporter leur condition. C’est d’ailleurs là une dimension qui s’étend à tous les champs d’intervention de l’homme. Le politique vit avec la virtualité d’être ministre, maire, président, député…et c’est ce rêve qui lui permet de supporter son combat continuellement ; l’étudiant vit avec le rêve d’être avocat, consultant international, médecin, professeur…et c’est cette projection qui l’aide à supporter tout son parcours.

Alors qu’il avait tout perdu au casino, un personnage de Dostoïevski ne s’empêcha pas de dire : « je ne me mettrai plus autour d’une table de jeu. Demain peut-être ! »

                                                   Par M. Ndiaye Alassane Mamadou

                                                   Etudiant, Sorbonne Paris1

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